LE FIGARO. – Quelles sont les tendances de recrutement qui se dessinent depuis ces dernières années?
Quelle place les réseaux sociaux occupent-ils désormais dans le recrutement?
Le métier de recruteur ne peut plus se faire sans technologie. Nous avons besoin des réseaux sociaux. Mais, des réseaux sociaux professionnels comme LinkedIn ou les «job boards», pas Facebook. Le métier de chasse en ligne permet de solliciter des candidats qui ne sont pas forcément à l’écoute. Le taux de retour est donc plus faible mais nous pouvons brasser davantage de candidats. Pour multiplier les chances de rencontres avec eux, nous publions également des offres sur Twitter ou Instagram. Ensuite, nous utilisons le CV vidéo pour les présenter. C’est un autre exemple de rupture. Ce format est, par ailleurs, moins discriminant et permet d’être plus proche de la réalité. Un candidat qui dit parler anglais ou être dynamique, ne pourra plus tricher. Ceci dit, il y a peu de discriminations chez les cadres où le chômage est à moins de 3%.
Les réseaux sociaux professionnels vont-ils prendre de l’ampleur dans les années à venir?
95% des candidats sont inscrits sur les réseaux sociaux. C’est incontournable. Peut-être que dans les années à venir, ils deviendront de plus en plus Premium, donc payants. LinkedIn utilise actuellement son quasi-monopole pour faire grimper les prix. Je pense que ça va continuer à augmenter. Le coût d’acquisition d’un CV va être plus cher donc nos prestations devront être aussi mieux valorisées. De nombreuses plateformes se créent, par ailleurs, pour les individus qui veulent travailler en tant que free-lance. Avoir un CDD ou un CDI ne veut plus dire grand-chose. Les candidats recherchent plus de profondeur dans ce qu’ils font. Ils veulent trouver du sens et la rémunération n’est qu’un élément du poste recherché. Ils veulent plus d’autonomie, de flexibilité et de liberté. La relation entre employé et employeur, très normée en France, est en pleine mutation. Ce phénomène change notre manière de recruter. Les candidats ont parfois des informations sur la réputation de l’entreprise visée que nous n’avons pas grâce à des plateformes comme Glassdoor. Ils peuvent consulter les avis laissés par les anciens salariés sur leur expérience au sein de la structure. C’est donc à nous, recruteurs, de nous adapter, pas l’inverse!
Ce phénomène fait-il le bonheur, ou est-ce au dam, des recruteurs?
Nous ne reviendrons pas en arrière donc nous devons considérer la digitalisation du recrutement comme un atout. Nous devons communiquer avec ces outils pour attirer les talents notamment ceux qui ont entre 25 et 35 ans. Les clients ne comprendraient pas si ce n’était pas le cas. L’humain prend ensuite le relais. Je ne vois pas comment nous pourrions faire sans l’humain. Il faut se méfier de l’Intelligence Artificielle qui peut mettre de côté des candidats aux profils atypiques. Des candidats qui auraient un état d’esprit différent pourraient ne pas être retenus. Même si nous faisons tous les tests en ligne de la Terre, la rencontre physique avec les candidats reste inévitable.
Les recruteurs ont-ils peur de l’Intelligence Artificielle (IA)?
C’est difficile d’avoir peur de l’IA car elle permet de gagner beaucoup de temps dans les processus de recrutement en affinant les listes de candidats. Sans cette présélection, nous n’y arriverions pas car nous devons aller de plus en plus vite dans un contexte de mondialisation des recherches. C’est un atout à condition que l’humain reste au centre des échanges. Heureusement, sinon je change de métier!